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La Conférence nationale des procureurs de la
République (CNPR) a présenté « 10 propositions
pour une meilleure justice » à l’occasion d’une conférence de presse qui
s’est tenue le 6 janvier au tribunal de Bobigny, en Seine-Saint-Denis. Cette
liste a été adressée au garde des Sceaux, mais aussi aux candidats à l’élection
présidentielle d’avril 2022.
A la Conférence nationale des procureurs de la République
(CNPR), le travail de réflexion pour une meilleure justice a débuté en juin
2021 et a été validé lors d’une Assemblée générale des procureurs de la
République en novembre dernier. Ces dix propositions formulées par la
Conférence nationale des procureurs de la République (CNPR) ont pour mission
d’alimenter la réflexion dans le cadre des États généraux de la Justice. Pour la CNPR, la nomination du procureur de la République par
décret présidentiel
pose le problème de l’indépendance de leur profession vis-à-vis
du gouvernement.
Pourtant, d’après le CNPR, « c’est un préalable incontournable
pour qui espère restaurer enfin la confiance de nos concitoyens dans les
décisions prises et l’impartialité de ceux qui sont des acteurs de la justice
pénale ». Les procureurs
proposent donc de mettre en place une nomination indépendante confiée au
Conseil supérieur de la magistrature, comme cela se fait déjà pour l’élection
des présidents des Tribunaux. D’autre part, ils appellent à la mise en place
d’une réflexion sur l’architecture du ministère public au niveau national, et à la modernisation de l’évaluation
professionnelle des procureurs de la République.
Le manque de moyens
toujours au cœur des problèmes
« Il est temps que notre pays se donne enfin les moyens d’une justice
conforme aux standards du grand État de droit qu’est la France »
estiment-ils. En effet, les moyens
alloués à la justice française sont loin des autres pays européens. À titre
d’exemple, la France consacre à la justice 69,52 euros par citoyen, l’Allemagne
131 euros, quand la moyenne européenne est de 84,13 euros. Malgré la hausse
historique du budget attribué à la justice au cours du mandat d’Emmanuel
Macron, les membres de la CNPR estiment tout de même
que « les efforts
budgétaires consentis par l’État ne sont pas à la hauteur du besoin de rattrapage ». Pour rappel,
le budget de la Justice était de 6,8 milliards en 2017, et
atteint les 8,9 milliards d’euros en 2022, soit une hausse de 30 %.
« Les procureurs
appellent de leurs vœux à une refonte du Code de la procédure pénale », mis à mal par les réformes au « coup par coup » : « Il est urgent de reconstruire un cadre
d’enquête simplifié, lisible et cohérent. » Pour pallier cela, les
procureurs suggèrent de recruter plus d’officiers de police judiciaire, car la
capacité de la justice pénale à juger et à condamner dépend étroitement de la
faculté de la police et de la gendarmerie nationale « à mener à bien des enquêtes probantes dans des délais raisonnables
». Ainsi, ils suggèrent de « renforcer le
nombre et la qualité des services enquêteurs pour un meilleur traitement des
procédures ».
Lutter contre la délinquance : grande cause
nationale pour la CPRN
Pour la CNPR, il est
indispensable de s’attaquer aux causes de la délinquance afin d’en limiter
l’impact dans le futur. D’après elle, pour y arriver, il est nécessaire
d’améliorer les réponses médicales, sociales ou éducatives, mais aussi la prise
en charge des personnes nécessitant des soins psychiques ou mentaux. De plus,
les procureurs estiment que lutter contre les addictions (alcool ou
stupéfiants) devrait être une des grandes causes nationales, car « réduire les
phénomènes d’addictions, c’est aussi réduire de facto beaucoup d’autres types
de délinquances : les trafics
de stupéfiants, les atteintes à l’autorité, les infractions routières, mais
aussi de très nombreuses atteintes aux biens ». Il importe aussi aux membres de la CNPR
de revoir le périmètre du « champ pénal » et d’envisager de
dépénaliser pour mieux sanctionner, en sortant par exemple certaines
infractions du champ pénal, comme les infractions routières mineures, les
litiges d’urbanisme ou de l’environnement et de les confier à d’autres
juridictions compétentes.
« Une justice qui
prend soin des victimes les plus fragiles »
Pour les procureurs de la République, il est essentiel d’améliorer la prise en charge des victimes. Dans cet objectif, ils proposent de systématiser au niveau national les dispositifs d’accompagnement renforcé des victimes d’infractions graves comme il en existe déjà dans certaines localités. Pour mettre en place un tel dispositif, la CNPR suggère qu’un chargé de mission, désigné par le procureur de la République, coordonnerait, « au bénéfice de la victime », l’action d’un ensemble de professionnels : avocats, psychologues, travailleurs sociaux… afin d’évaluer les besoins de la victime, mettre en œuvre les prises en charge permettant de satisfaire ces besoins. Il s’assurerait également de l’accompagnement personnel de la victime tout au long de la procédure : « cette réponse constitue la plus à même d’offrir aux victimes les plus fragiles le soutien et la stabilité nécessaires pour affronter une procédure qui peut s’avérer être un traumatisme supplémentaire ».
Les procureurs de la République dénoncent également le
manque de numérisation au pénal. En effet, dans un rapport d’octobre 2021 sur
l’amélioration du service public de la justice, la cour des comptes constatait
que « Le ministère de la Justice a
accumulé un retard considérable en matière numérique, par rapport aux autres
ministères, mais également par rapport à ses homologues européens. » La
CNPR propose trois grands axes « pour
réussir le pari de la transformation numérique en matière pénale » : approfondir la dématérialisation pénale et la formation des
agents dans le but de construire de véritables outils d’aide à la décision ;
unifier la chaîne de soutien informatique ; et utiliser le numérique pour
renforcer la proximité avec le justiciable.
Tina Millet
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