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Parole de l'enfant en justice : un délicat équilibre


mardi 13 juin 20237 min
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13/06/2023 18:15:11 1 10 3706 66 0 13751 3394 3512 Le 119e congrès des notaires s'attaque au logement

Alors que l’immobilier connait une baisse d’activité due à l’inflation et à la hausse des taux d’intérêt sur les emprunts, les notaires vont justement tenir leur 119e congrès sur le logement, du 27 au 29 septembre prochains à Deauville. À l’invitation de Sophie Sabot-Barcet, présidente du Conseil supérieur du notariat, le président du congrès, Yves Delécraz, et son rapporteur général, Éric Cevaer, ont dévoilé la semaine dernière quelques-unes des propositions des trois commissions qui étudient encore le sujet jusqu’à la rentrée.

Sophie Sabot-Barcet note que la faiblesse de l’activité immobilière provient de quatre phénomènes : la fin de l’euphorie post covid, l'arrêt quasi total de la construction neuve, la hausse des taux d'intérêt et la difficulté d'accès au crédit, ainsi que les exigences de rénovation énergétique qui découragent. Par ailleurs, les conclusions du Conseil national de la refondation ne comportent pas de mesure choc. Dans ce contexte, il est opportun que le 119e congrès des notaires de France amène justement la profession à formuler des propositions législatives ou réglementaires visant à améliorer la politique du logement mais aussi à faciliter le parcours immobilier de nos concitoyens.

Yves Delécraz, président du congrès, indique qu’il appartient aux pouvoirs publics de trouver une réponse aux doléances de la filière mise à mal par la conjoncture, et de l’aider à passer le cap. L’équipe du congrès mène pour sa part depuis maintenant un an et demi ses réflexions sur le fonctionnement du système immobilier en France. Le but de ce travail est de modifier l'arsenal juridique en vigueur pour faire progresser le logement en suivant sa chronologie : construction, acquisition/location, transmission. Suivant cette logique, le programme de Deauville se divise en trois commissions : « développer l’offre de logement », « favoriser l’accès au logement » et « pérenniser son logement ». Parmi les propositions en cours d’élaboration, cinq ont été choisies par les notaires pour être dévoilées avant le mois de septembre.

Développer l’offre de logement

Les deux premières propositions viennent de la commission 1, « développer l’offre de logement ». L’une est relative au permis de construire. En effet, dans la création d’une construction, la délivrance de cette autorisation par l'administration est déterminante. En bout de chaîne, le maire donne son aval. Il en a la légitimité démocratique et maîtrise les caractéristiques locales de sa commune. Mais la difficulté pour le demandeur réside dans le délai de la réponse.

En conséquence, dans une recherche d’efficacité, la proposition se fixe pour but d’accélérer le processus et de limiter les contestations. Comment ? En réalité, un chantier de construction ne bénéficie pas du « respect » qui devrait lui revenir si l’on considère le logement comme une priorité nationale. Or, en pratique, dès qu’une affiche de travaux est placardée, les riverains s’inquiètent d’avoir à court terme un bâtiment de plusieurs étages voisin, préférant que le terrain reste vierge.


Il faudrait donc, selon les notaires, revoir la communication en amont. Si un projet de construire est mieux expliqué, mieux compris, alors, au jour de la délivrance de son autorisation, il est également mieux accepté. L’amélioration du processus de concertation entre habitants, associations et administrations neutralise les contestations futures potentielles et le temps à leur consacrer. Par ailleurs, dans le cadre de l'instruction d'un permis, une multitude d'intervenants sont interrogés. Si le maire pouvait en réunir l'ensemble dans un délai déterminé, la décision arriverait également plus vite.

L’autre proposition traite du cahier des charges de lotissement. Dans un lotissement, des documents internes organisent la vie collective des habitants, et parmi eux, le cahier des charges. Il prévoit des règles privées équivalentes à celles d’un règlement de copropriété. Ce document contractuel validé au départ reste intangible, sauf modification voulue par l’unanimité des membres du lotissement. Or souvent, les cahiers des charges anciens contiennent des dispositions contraignantes en matière de constructibilité. Ils s’opposent généralement à la construction d’un immeuble d'habitation. Cela constitue aujourd'hui un véritable blocage qui n'a plus de justification. Ce problème récurrent identifié depuis longtemps n’a pas trouvé de solution pour l’heure.

L’idée de la première commission est de permettre au maire de mettre en concordance le cahier des charges avec la réglementation d'urbanisme. Cette procédure peu utilisée existe déjà, mais il faut la développer et l’encadrer, notamment pour la construction de bâtiments participant à une mission d'intérêt public.

Favoriser l’accès au logement

Les deux propositions suivantes viennent de la commission 2, « favoriser l’accès au logement ». Actuellement, un peu plus de la moitié des Français sont propriétaires de leur logement. Pour un locataire, le parcours résidentiel commence parfois par le parc social, mais l'objectif partagé par tous est de pouvoir devenir un jour propriétaire de son habitation. Il convient, pour la commission, de l’accompagner, afin de lui permettre d’atteindre ce but et de fluidifier ce cheminement pour tout le monde.

Le système fonctionne mal : plus de deux millions de familles attendent un logement social ; en zone tendue, les loyers sont trop chers et les particuliers ne peuvent pas acheter ; et enfin, le parc du segment intermédiaire, celui qui serait abordable, est insuffisant. Pour accroitre l’offre de locations sur ce segment, la commission souhaite rendre l'investissement immobilier attractif et simplifier la gestion associée à un bien.

Jusqu’à présent, les Français évitent ce placement non rentable car surtaxé (revenu, capital, transmission). Pour simplifier, les notaires proposent de mettre en place un système uniforme qui traite le propriétaire bailleur qui le souhaite comme un entrepreneur. C’est-à-dire que l’investisseur immobilier choisit d’opter pour un statut, celui de particulier ou de professionnel, et pour la fiscalité associée, qu’il s’agisse de location nue ou meublée.

La réflexion suivante veut faciliter l'accès à la propriété dans le segment du logement intermédiaire. Sont concernés les foyers avec des revenus qui leur interdisent d'accéder au logement social, et qui ne disposent pas du budget élevé permettant d’acheter en zone tendue. La deuxième commission envisage de s’appuyer sur les sociétés d'HLM.

Lorsqu’un gestionnaire de parc social propose à ses locataires de leur vendre les appartements qu'ils occupent, le prix de la cession est décoté en-dessous du marché de 15 à 30 %, parfois plus. Ce dispositif offre la possibilité à l'acquéreur, qui sans cela n'a pas les moyens d'acheter là où il est locataire, de devenir propriétaire de son logement. Ce type de vente est assorti d’une clause anti-spéculative limitée dans le temps. Elle empêche habituellement pendant 5 ans l’acquéreur de revendre plus cher qu’il n’a acheté, sauf à reverser la plus-value à l'opérateur social qui lui a cédé. Pour profiter de la plus-value, le propriétaire attendra donc la fin du délai de prescription et revendra au prix du marché. Cependant, est-il légitime que l’effort public initial, destiné au logement social, s’éteigne, capté par un particulier ?

Pour l’éviter, le logement doit être maintenu dans le segment intermédiaire bas. La commission 2 préconise donc d'imposer lors des reventes successives la même décote que celle dont le propriétaire de départ a profité.

Pérenniser son logement

La commission 3 « pérenniser son logement » divulgue également deux de ses idées en cours de maturation à propos de la conservation et de la transmission du logement. S’agissant de la conservation, elle est soumise aux aléas contemporains perturbant le bâtis (rénovation énergétique, télétravail…) et la vie de ses occupants (éclatement de la cellule familiale, dépendance…).

La commission 3 appelle à élargir à la famille la vente en viager et le prêt viager hypothécaire dont les demandes augmentent. Or, l'article 918 du Code civil crée un blocage inopportun. Pour un viager, avant de chercher un acheteur externe, peut-être qu’un des membres du cercle familial, en particulier un enfant, est intéressé. Aujourd'hui, la vente n’est pas réalisable, sauf accord unanime de tous les enfants. Et le Code civil estime que vendre en viager à un de ses enfants revient à lui faire une donation sans percevoir de rente.

Cette interprétation de détournement du viager est décalée de la réalité familiale et économique, considère la commission, qui estime nécessaire de supprimer l’article 918 et de mettre à contribution l'aide familiale quand l'aide nationale fait défaut. Le prêt viager hypothécaire, qui n’a pas rencontré de succès, mériterait également selon elle d’être remis à l'ordre du jour et élargi au sein des familles.

Par ailleurs, à court terme, les passoires thermiques quitteront le marché de la location. Mais la rénovation énergétique représente un chantier global au coût élevé. Dans une copropriété qui ne se résout pas à le lancer pour des raisons budgétaires, la passoire thermique perdure.

La commission appelle donc à « libérer » la rénovation dans les copropriétés. Des dispositifs tels que le contrat de performance énergétique (CPE) existent mais ne sont pas assez déployés au goût des notaires. Le CPE a une application limitée essentiellement aux collectivités publiques et aux gros opérateurs. Pourquoi ne pas étendre ce schéma juridique à une copropriété ou à un groupe de copropriété ? Pour être efficace, la rénovation énergétique doit être massive. Aussi, peut-être pourrait-elle être envisagée à l’échelle d'un ilot plutôt que d'un immeuble isolé.

La question majeure de la rénovation énergétique est complexe. Elle concerne l’ensemble des trois commissions. Le 119e congrès de notaires de France entend formuler une proposition collective sur ce sujet.

Cyrille de Montis

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