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En mars 2004, à l’occasion du bicentenaire du Code civil, le président de
la République promettait de réécrire en cinq ans le droit des contrats et celui
des sûretés pour la simplification et le rayonnement du droit français. Si,
pour le droit des contrats, douze années ont été nécessaires, le droit des
sûretés a été réformé dans les deux années qui ont suivi par l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006. La nouvelle réforme issue
de l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 a été voulue dans le prolongement de
cette stratégie réformatrice dans un souci d’harmonisation, d’amélioration et
d’efficacité. Elle donne d’abord une définition plus moderne de l’hypothèque.
Le réformateur a en effet jugé utile de clarifier cette définition en la
simplifiant. Le nouvel article 2385 du Code civil
dispose ainsi que « L’hypothèque est l’affectation d’un immeuble en
garantie d’une obligation, sans dépossession de celui qui la constitue. »
La disposition contenue dans l’ancien article 2398, selon laquelle « les meubles n’ont point de
suite par hypothèque », disparaît quant à elle. Cette disparition est
la bienvenue dès lors qu’il existe des hypothèques particulières sur les
meubles telles que l’hypothèque maritime, fluviale ou aérienne, pour lesquelles
le bénéficiaire jouit d’un droit de suite.
Au-delà, l’hypothèque, « reine des sûretés », du fait de sa
capacité à concilier l’équilibre entre les intérêts des contractants et ceux
des créanciers, voit son régime modernisé. Après plusieurs années de pratique,
le réformateur a en effet souhaité la simplifier et l’adapter pour répondre
tant aux nouveaux besoins qu’aux difficultés rencontrées par les praticiens
concernant, d’une part, l’étendue et la formation de l’hypothèque, et d’autre
part, ses effets et sa mise en œuvre. Découvrons ci-après les nouveaux aspects
de cette sûreté si chère aux établissements financiers, où se profilent de
nouvelles potentialités et une importante évolution du classement des
créanciers.
De nouvelles potentialités
L’ordonnance étoffe le champ d’application de l’hypothèque en inscrivant
expressément au sein du nouvel article 2390 du Code civil
le principe selon lequel l’hypothèque s’étend de plein droit aux intérêts et
autres accessoires de la créance garantie et que cette extension « profite
au tiers subrogé dans la créance garantie ». Si le premier point
n’est pas nouveau (C. civ., art. 2423 ancien), la précision relative au tiers subrogé résout une importante
difficulté affectant la pratique des prêts dits « substitutifs »,
c’est-à-dire le cas dans lequel l’emprunteur se refinance auprès d’un nouveau
prêteur en le subrogeant dans la créance de l’ancien, ce qui a pour effet de
lui transmettre aussi l’hypothèque garantissant celle-ci (v. Ch. Gijsbers, La
transmission de l’hypothèque au créancier subrogé dans la créance garantie, JCP
N 2021, n° 46, 1325). Sous l’empire des anciens textes, la question se posait
de savoir si le nouveau prêteur subrogé pouvait ou non prétendre au bénéfice de
l’hypothèque ainsi transmise y compris pour les accessoires stipulés au sein du
nouveau prêt (intérêts, frais de poursuite, pénalités de remboursement
anticipé…). Question légitime, puisque la subrogation n’opère qu’à hauteur du
paiement, alors que lesdits accessoires n’ont évidemment pas été payés par le
nouveau prêteur puisqu’ils ont été convenus dans le nouveau prêt. L’article 1346-4 du Code civil, issu de la réforme du droit des
obligations intervenue en 2016, avait résolu ce problème par l’affirmative
s’agissant des intérêts. Toutefois, ledit problème demeurait pour les autres
accessoires, que ce texte ne visait pas. Le voici donc intégralement résolu à
l’occasion de la réforme du droit des sûretés. Celle-ci ne laisse plus aucun
doute sur l’étendue de la couverture de la dette garantie dans le cadre d’une
subrogation personnelle. En pratique, il ne sera donc plus nécessaire lors
d’une subrogation de constituer une hypothèque conventionnelle complémentaire
pour englober les accessoires autres que les intérêts. Cette nouveauté va permettre
d’alléger les coûts du refinancement.
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