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La 126e édition de l’événement annuel, qui s’est tenue au Parlement européen de Strasbourg, le président de la Conférence générale des juges consulaires de France a appelé à maintenir la publicité des privilèges de la sécurité sociale. Sa suppression, prévue dans le prochain PLFSS, pourrait selon lui avoir des conséquences claires : « Moins de visibilité, plus de risques pour les entreprises et pour la protection des recettes sociales. »

C’est la première fois que l’événement se déroulait au cœur de l’Europe. Jeudi 13 et vendredi 14 septembre s’est tenu le 126e congrès des juges consulaires de France, dans l’enceinte du Parlement européen, à Strasbourg. « Un lieu exceptionnel dans une ville profondément européenne, où se croisent les cultures, les langues, les institutions, qui incarne à sa manière l’esprit de dialogue, d’ouverture et de coopération que nous voulons faire vivre dans notre justice consulaire », a estimé Tony Fasciglione, président de la Compagnie des juges consulaires de Strasbourg, lors de la séance solennelle du congrès.
Une ville qui illustre également la complexité de la justice commerciale dans une économie mondialisée : « Bon nombre d’entre nous ont rencontré des échanges qui dépassent les frontières, car les difficultés d’une société alsacienne peuvent impliquer un partenaire allemand, un créancier belge ou un client italien », a déclaré Tony Fasciglione devant les 200 juges des tribunaux de commerce ou tribunaux des activités économiques.
Pour lui, les institutions de justice économique sont des acteurs de stabilité dans un contexte d’incertitude : « Les juges consulaires apportent au monde judiciaire leur expérience du terrain économique, leur sens du pragmatisme et leur humanité. Nous écoutons, nous concilions, nous décidons. »
C’est l’incertitude et les changements législatifs qui inquiètent le président de la Conférence générale des juges consulaires de France, Michel Peslier. Au micro, celui-ci s’est principalement inquiété sur le projet de suppression de la publicité des privilèges de la sécurité sociale prévu dans le PLFSS pour 2026 : « Les conséquences sont claires : moins de visibilité, plus de risques pour les entreprises et pour la protection des recettes sociales. » Michel Peslier a appelé à maintenir cette publicité, « levier indispensable de la prévention », et même à la renforcer, en abaissant les seuils et en accélérant la numérisation afin de « favoriser le libre accès aux données ». Objectif : protéger les entreprises et leurs salariés : « Derrière chaque entreprise en difficulté, il y a des femmes, des hommes et des emplois, et nous devons faire vivre la justice commerciale comme un levier d’action rapide et efficace. »
Le président a aussi appelé à agir encore plus tôt, afin de détecter les difficultés dès qu’elles surviennent, notamment pour les petites entreprises. Ce qui pourrait passer par une responsabilisation plus grande des dirigeants d’entreprise : « Nous devons encourager la transparence et la déclaration rapide des difficultés. » L’accélération de la justice économique, par le raccourcissement des procédures et le renforcement du rôle du juge consulaire, pourrait aussi être un levier efficace.
Le président de la Conférence a aussi assuré que le budget des tribunaux de commerce et des activités économique était « un combat majeur » de son mandat. « Je n’ai jamais lâché, car cela conditionne la vitalité et l’efficacité de notre justice économique. » Une justice soutenue par les 3 370 juges bénévoles exerçant dans les différents tribunaux de commerce. « Cette contribution, que j’ose qualifier d’exemplaire, mérite clairement d’être reconnue et soutenue. »
Michel Peslier est également revenu sur l’expérimentation de la contribution pour la justice économique, mise en place au sein des 12 nouveaux tribunaux des activités économiques. Entre 15 000 et 1 million d’euros par TAE ont été récoltés au cours du premier semestre.
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Une contribution qui pourrait servir à payer les juges consulaires ? Si, pour l’instant, contrairement à ce que son nom indique, ses revenus ne servent pour l’heure pas à financer les TAE, Michel Peslier a appelé à modifier l’article L722-16 du Code de commerce et ainsi à indemniser ces professionnels au titre des frais engagés : « Le bénévolat qui nous honore ne doit pas devenir un mécénat de justice. Il doit être l’expression d’un engagement, non le prix d’une abnégation ou d’un sacerdoce. » Sur le recrutement des assesseurs agricoles, il manque là aussi, selon le président de la Conférence générale des juges consulaires de France, un moyen d’« indemniser équitablement l’absence qu’impose cet engagement au sein de l’exploitation agricole ». « Nul ne doit avoir à choisir entre choisir la justice et la préservation de l’équilibre de son activité professionnelle », a-t-il martelé.
Au sujet du devoir de compétence des juges consulaires, obligation essentielle, Michel Peslier a annoncé le lancement, dès l’an prochain, d’un programme de formations « innovant, pour offrir des compléments théoriques permettant de mieux appréhender et maîtriser les mécanismes juridiques complexes ». Des formations à distance sous la forme de cycles d’une durée de deux heures accessibles à tous. Le partenariat avec l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne sera renforcé avec la création d’une nouvelle offre de formation dès 2026, offerte gracieusement aux juges consulaires. Celle-ci sera déclinée en deux temps : un perfectionnement sur six mois avec trois modules (introduction du droit, procédures civiles et droits des obligations) et une séance d’échanges et d’évaluation. Pour ceux souhaitant aller plus loin, il sera possible d’étudier un diplôme universitaire, sur le traitement des litiges ou le droit des entreprises en difficulté.
Michel Peslier a enfin appelé à « répondre avec responsabilité aux enjeux de l’intelligence artificielle ». « Loin d’être une menace, elle pourrait être un formidable levier au service du discernement du juge, de la sécurité juridique et de la confiance des justiciables envers notre institution judiciaire. » Une mission interprofessionnelle avec les autres professions du droit et du chiffre a été mise en place par la Conférence en juin dernier, afin de définir une doctrine commune et les usages responsables de l’IA. Un projet de mise en place d’un moteur de recherche boosté à l’intelligence artificielle, destiné à faciliter la recherche documentaire sur la plateforme dédiée aux juges consulaires est également en cours. Un programme de formation dédié sera disposé en juin par l’École nationale de la magistrature (ENM). « Ensemble, continuons à bâtir une justice économique de courage et de responsabilité, une justice qui anticipe, accompagne et redonne confiance », a conclu Michel Peslier.
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